Le gaz hilarant fait toucher le fond
- Daniel Hounhouedo
- 25 août 2024
- 3 min de lecture
Jean-Luc Da Silva Lopes, alias Dadi la Cité est passé de footballeur pro à influenceur engagé contre le protoxyde d’azote. Il n'a qu'une mission. Empêcher de sombrer comme lui à cause de cette drogue.
À Marseille, dans le quartier de Frais-Vallon, bien loin de la colline du crack à Paris, les jeunes se rassemblent pour "faire un ballon". Mais ici, ce n’est pas du foot dont il est question, mais d’inhalation de protoxyde d’azote, cette substance autrefois utilisée pour les siphons à chantilly, qui est devenue une drogue de rue. Jean-Luc Da Silva Lopes, plus connu sous le nom de Dadi la Cité, était l’un d’eux. Aujourd’hui, à 28 ans, après avoir frôlé le pire, il se sert de sa notoriété sur les réseaux pour alerter la jeunesse sur les dangers de cette pratique qui lui a coûté une paralysie faciale.
De la gloire au vide : le parcours de Dadi
D’origine portugaise et capverdienne, Dadi a grandi entre les tours des quartiers Nord de Marseille. Il a toujours baigné dans le foot et, grâce à son talent, il avait même signé un contrat pro de trois ans au Luxembourg. Mais après une saison seulement, tout s’effondre. Mis de côté, il sombre dans la dépression et décide de tout arrêter en 2020. De retour à Marseille, il troque les crampons pour les soirées débridées. « C’était le confinement, on s’ennuyait. J’ai commencé à enchaîner les soirées, et c’est là que j’ai découvert les ballons. Ça te fait planer quelques secondes, t’es joyeux… mais ça redescend vite. Et pour retrouver cette sensation, t’en prends encore et encore, jusqu’à plus pouvoir t’arrêter. C’est comme ça que je suis devenu accro », raconte Dadi au Parisien.
Plongée dans l’enfer des ballons
Ce qui n'était au départ qu'une "distraction" devient vite une habitude destructrice. Les bonbonnes de proto deviennent son quotidien : de quelques ballons par semaine, il passe à une consommation démesurée, jusqu’à six bonbonnes par jour. « C’est trop facile de s’en procurer, y en a partout dans les épiceries du quartier. »
Les premiers signes d’alerte apparaissent autour de lui. « Des potes commençaient à avoir des fourmis dans les mains, certains ne pouvaient plus marcher… Mais moi, je ne ressentais rien, alors je pensais que j’étais plus fort que ça. » Jusqu’au jour où, en 2023, son corps lâche. « Je me réveille un matin, je veux manger, mais impossible : tout mon côté droit était paralysé. J’ai flippé. Je ne pouvais même plus boire sans en foutre partout. »
De la descente à la prise de conscience
Au début, Dadi cache tout à ses proches. « À ma mère, j’ai dit que c’était un virus. Elle me voyait footballeur, elle croyait en moi… Je ne voulais pas la décevoir. » Après son hospitalisation, il suit un traitement à base de vitamines B9 et B12 pour récupérer. Il lui faudra 25 jours pour que la paralysie disparaisse, et des mois pour retrouver un semblant de vie normale. « Heureusement, j’ai eu de la chance, les vitamines ont suffi. »
En septembre, un ami l’encourage à partager son histoire sur TikTok. Sa vidéo explose avec 2 millions de vues en 24 heures. « Au début, j’hésitais. C’est dur de s’exposer comme ça, mais je me suis dit que c’était nécessaire. »
Un message pour la jeunesse et le monde du sport
Aujourd’hui, Dadi la Cité utilise son influence pour sensibiliser les jeunes. Avec ses 145 000 abonnés sur TikTok, il met en garde contre cette drogue banalisée : « Le bonheur que tu ressens avec un ballon, c’est du fake. Ça te détruit, physiquement et mentalement. »? explique t-il dans une vidéo. Elle a touché près de 3 millions d'internautes sur la toile. Mais Dadi, ne s'arrête pas là, il enchaine vidéo sur vidéo.
Son message vise aussi le monde du football. En 2018, une vidéo choc révélait des stars d’Arsenal, comme Lacazette et Aubameyang, en train de consommer du protoxyde d’azote. Mais Dadi insiste sur le fait que même les joueurs moins connus ne sont pas épargnés :
« Il y a des mecs qui ont dû stopper leur carrière parce qu’ils se sont paralysés avec les ballons. Ils n’en parlent pas publiquement pour ne pas ruiner leur image. »
Dadi espère que son témoignage servira d’exemple : « Je veux que les jeunes de Marseille et d’ailleurs sachent que ce kiff éphémère peut ruiner ta vie. » Aujourd’hui, il continue de faire passer son message, avec l'espoir de faire changer les mentalités et d’empêcher d'autres jeunes de tomber dans le même piège que lui.




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